Catégorie : Poétesses et poètes
Un poème, un pays
Un festival nommé désir
Le 14e festival du Printemps des Poètes – Luxembourg se tiendra les 24, 25 et 26 septembre 2021 autour du thème « le désir ». Un thème qui s’affiche comme une promesse car
NEUF AUTEURS INVITÉS
TROIS DATES, TROIS LIEUX
Le vendredi 24 septembre à 19h – Soirée d’ouverture au CELO (Hesperange, 476, rte de Thionville à Hesperange). Accueil dès 18h30. Entrée libre (régime CovidCheck). Réservations: info@printemps-poetes.lu
Lectures le vendredi soir au CELO de
Serge Basso de March (LUXEMBOURG)
Ákos Györffy (HONGRIE)
Doina Ioanid (ROUMANIE)
Rui Lage (PORTUGAL)
Lisette Lombé (BELGIQUE)
avec la participation des lauréat(e)s du concours
Jeune Printemps édition 2021
Le samedi 25 septembre à 19h – Grande nuit de la poésie; accueil dès 18h30. Entrée libre (régime CovidCheck). Réservations: billetterie@neimenster.lu
Lectures le samedi soir par tous les poètes invités
en deux temps (19h-20 / 21h-22h)
Annelisa Alleva (ITALIE)
Serge Basso de March (LUXEMBOURG)
Rim Battal (FRANCE)
Ákos Györffy (HONGRIE)
Doina Ioanid (ROUMANIE)
Rui Lage (PORTUGAL)
Lisette Lombé (Wallonie/BELGIQUE)
Judith Nika Pfeifer (AUTRICHE)
Lluís Roda (Pays valencien/ESPAGNE)
avec une pause-repas (20h-21 h).
Deux assiettes froides au choix (17,50 euros – réservation préalable!).
Le dimanche 26 septembre à 11h – Matinée poétique à la galerie Simoncini – exclusivement en diffusion livestream sur la page Facebook du PPL
Encadrement musical tout au long du festival: Vedran Mutic.
Régime CovidCheck de rigueur.
Un poème, un pays
ROUMANIE – Ioan T. Morar
Duminica toreadorului
Electrocutat de propria înțelegere
Ca de o limbă pe care o vorbesc celulele mele,
mădularele și nervii mei reci cînd spun
se ridică și spun : Da, un poem social,
chiar dacă el nu va vindeca nici o rană
chiar dacă nu se va dumica
Un poem social ca un Luna Park luminat :
Curajul este chioșcul de la care îmi cumpăr ziarul
fluxul și refluxul
limitele între care îți poți înălța un castel
Eu scriu despre ce cred
Eu cred în eficacitatea durerii
Măcar de aș putea să adaug
acest poem la inventarul iluziei
măcar de aș putea să rămîn singur cu o ureche surdă
în care să strig nestingherit :
-Mă mai tulbură doar
lipsa de criterii a morții
Le dimanche du toréador
Électrocuté par ma propre compréhension
Comme par une langue que parleraient mes cellules,
Mes membres et mes nerfs froids quand ils disent
Ils se lèvent et disent : Oui, un poème social
même s’il ne fait guérir aucune blessure
même si nous n’avons pas de morceaux pour tous
Un poème social comme un Luna-Park tout éclatant :
Le courage est le kiosque où j’achète mon journal
la marée haute et la marée basse
les jalons entre lesquels on peut se faire bâtir un alais
j’écris ce en quoi je crois
je crois en l’efficacité de la douleur
Si seulement je pouvais ajouter
ce poème à l’inventaire de l’illusion
si seulement je pouvais rester seul avec une oreille sourde
à laquelle je puisse crier sans entrave :
Il n’y a rien qui me trouble sinon
le manque de critères de la mort
(Traduction: Carmen Blaga)
Un poème, un pays
PORTUGAL – Raquel Serejo Martins
Horário de inverno
Só queria ser uma dessas pessoas
que ao fim do dia passeiam o cão pelo jardim
com um saco de plástico para recolher a merda.
Dessas que ninguém duvida
que tem uma família feliz à espera.
E uma família feliz não é o prato número trinta e três
encomendado no chinês do bairro
para aquecer no micro-ondas,
é uma mulher, é um homem,
que quer envelhecer comigo,
e que a cada noite me dá a mão e me leva
do sofá para a cama.
Heure d’hiver
J’aimerais juste être une de ces personnes
qui vers la fin de la journée promènent leur chien dans le jardin
avec un sac plastique pour ramasser la merde.
De celles dont personne ne doute
qu’elles ont une famille heureuse qui les attend.
Et une famille heureuse ce n’est pas le plat numéro trente-trois
commandé chez le chinois du quartier
à réchauffer au micro-ondes,
c’est une femme, c’est un homme,
qui veut vieillir avec moi,
et qui chaque soir me tend la main et me mène
du canapé au lit.
Extrait du livre Subúrbios de Veneza (2017)
*** (second poème) ***
Deixei o meu coração no forno,
é só aqueceres e tens jantar.
O que sobrar dá ao gato.
Eu sempre gostei do gato.
J’ai laissé mon coeur dans le four,
il suffit de réchauffer et ton dîner est prêt.
Les restes, donne-les au chat.
J’ai toujours aimé le chat.
Extrait du livre Aves de incêndio (2016)
(Traductions: Sónia da Silva)
Un poème, un pays
LUXEMBOURG – Florent Toniello
Mon requiem
J’irai décharné dans un halo de photons
arrachant aux fantômes des lambeaux d’au-delà
mon suaire de neutrinos râpera des bribes de matière
nue sous les soleils vieillis du big-bang
de mon écharpe de quarks je nourrirai les vers
de la terre atrophiée de nutriments adéquats
je n’abuserai pas de mon escouade de muons pour me
réincarner dans les couloirs courbés du temps
en gluon de la tombe aux reflets électriques ;
en tau massif chargé de potentiel réincarnatoire
•
J’entamerai un ultime
désassemblage biologique
certifié conforme
par
l’univers en expansion
Je ne crois en ce monde
qu’aux particules
élémentaires —
ma religion
c’est le boson.
Inédit
(publié sur le blog personnel : http://accrocstich.es/ post/2019/05/21/Mon requiem)
Un poème, un pays
LUXEMBOURG – James LEADER
Phoebe and the troopship
Spread across cushions on her yacht,
Phoebe, engrossed, does not
Observe the vulture on the wire, the boys that trot
Behind a limping, bony cow,
The fisherman drifting in his dhow,
Or the rocky field with an abandoned Soviet plough.
Attention puckers up her nose
As she paints the last two toes
Revlon cherry red, leans to them and softly blows,
And then reclines, her business done,
Under the Egyptian sun;
Across her bikini suit blood-red cherries run.
Half-asleep, in her imaginings,
She summons movie stars and kings,
Furs, photographers, limousines and emerald rings —
Meanwhile, on a northern tide,
Comes the troopship Empire Pride,
With a thousand Tommies on the starboard side.
A shadow falls on Phoebe’s bed,
And a throbbing starts to spread
Through the cushions, up her legs, into her head;
The great propeller slows
As they pass the English rose
Pink and white, with cherries on her breasts and toes.
They cheer, they whistle and salute,
As she stands in her bikini suit,
And bows — a thousand minds that night see falling fruit.
Now, tiny in her wingback chair,
She searches helpless in the air,
‘Dear One … remember, all those boys, and me … now where…?’
‘Suez,’ I prompt her, ‘on a yacht.’
‘Yes, yes,’ she grins, ‘the boys, that yacht.’
The rest — two husbands, career, a life — quite forgot.
Un poème, un pays
LUXEMBOURG – Francis Kirps
Der Diktator ist tot
An diesem Tag trugen die Palmen dunkelgrün,
und die Sonne war von Flecken schwarz.
Die Dichter traten blinzelnd
aus ihren Gefängnissen.
Die Rebellen stiegen von den Bergen hinab
um ihr Abitur nachzuholen und Verantwortung
Zu übernehmen. Der Ex-Präsident,
ein achtzigjähriger Greis, schickte eine Videobotschaft
aus dem Exil in Florida.
Der Spion flog in die Kälte zurück.
Straßen wurden neu benannt.
Gräber wurden geöffnet.
Statuen verloren den Kopf.
Zeitungen schrieben für kurze Zeit die Wahrheit.
Maria stand in der Tür der Cantina
und lachte über die Betrunkenen.
Denn an jenem Tag floss der Rum wie Tränen
durch die Adern der Hauptstadt
und der Barmmixer im Café Ingles
erfand einen neuen Cocktail.
Jeder hatte plötzlich ein Gewehr.
Feuerwerk wie ein Vulkanausbruch.
Die Kinder riefen seinen Namen
während Lacher groß wie Kokosnüsse
über die Insel kullerten.
Ein neuer Tanz entstand
und wurde nach ihm benannt.
Durch die benachbarten Bananenrepubliken
ging ein Ruck. An jenem Tag
brannte die Sonne über dem Meer
ein Loch in den Himmel. Schwertfische und
Barracudas standen stramm. So zumindest
erzählen es die Fischer.
Un poème, un pays
LIECHTENSTEIN – Vlado Franjević
Svakakvo Vrijeme
došlo je vrijeme u kojem se ne bavimo
primarnim vrijednostima
nego pitanjima
dokle smijemo popuštati
a da nas se zbog toga ne razumije
slabićima i naivcima
došlo je vrijeme strahova
slabosti
i mutacija svakakvog smeća
kao mogući izlaz
kucanje srca
samo tužni molovi
od suza ditiramb
ko da pljušti po staklu vanjskog prozora
ko da nikoga nema
kad ga
kao otvorim
Allerartzeiten
es ist die zeit gekommen
in dieser wir uns nicht mit
primären dingen beschäftigen
sondern mit fragen
bis wann wir nachgeben dürfen
und dabei
nicht als weicheier und naive schwachköpfe
gekennzeichnet werden
es ist die zeit der ängste und schwäche
gekommen
und die mutation allerlei abfälle
als vielleicht der einzig mögliche ausweg
herzklöpfen
nur noch traurige mole
als ob die trennendithyrambe
aussenfensterglasabwärts trommeln
als ob es niemanden gibt
wenn ich das fenster
als ob
öffne
Un poème, un pays
FRANCE – Hélène Fresnel
Une terre où trembler
Mais je suis allée jusqu’au matin
Il esseule il extasie
Jusqu’à la nuit pierre
Elle est encore elle dure
Jusqu’à la matière
Du lit noir au lit bleu j’ai lu jusqu’au chemin
De tes mots ou de tes lèvres
Je ne sais plus, déjà
J’ai lu dans ton existence
Mes failles, mes légitimes
Des cryptes de contacts au lieu des aplats blancs
Ce soir je regarde la pluie
Les yeux dans l’évident
Il y a des signes purs exempts de dénouement
*
Tu n’es pas revenu et ce soir
Le lieu du rendez-vous brûle sous le vent noir
Royaume – Cible du ciel où s’engage une flamme
Royaume – Enoncé de la nuit vécue et illusoire
Je te parle d’à travers la fore
Je te parle d’à travers la fore
L’ombre de ton visage maintient le territoire
Je me tourne vers lui Royaume et lui redis :
– Je t’engage
Etends les terres mongoles et retiens notre histoire
Avant une nouvelle heure
Avant un nouveau leurre
Il faut jouer la victoire
Mon amour je te parle à travers l’amphore
Et le sable du temps qui mange ton image
*
La digue à Colombo ne cédait rien
Ni habillée par les passants, ni trouée par les yeux des animaux perdus
Quelles nouvelles? Du premier pas, quelles nouvelles?
Dans tes pays hors des escales même phénomène
Des buildings naissaient de fenêtres en mâchoires ou carrés de tes ombres
Rien pour débander l’île
Dont la coque est un livre
Je pars sous l’alphabet la mousson la moiteur
Défie le jeu du drone ou l’avenir se rétracte
Et j’attends le déclic
Ombrelles tropicales
Etes-vous comme lui
L’autre du monde
Une tige infinie
Dont le cap a l’attrait des centres disparus
*
Avant et après moi dans l’illisible noir
Je surprends ce qui dure
Je parle d’une pierre
C’est un contrepoint blanc
Ni dehors ni dedans
Sa couleur jure
Son oeil me ment
Disculpé par le ciel
Une pierre
Déclenche en me fixant
Un flash d’espoir
*
Sous le grand tapis blanc des éléments perdus
Non ce n’était pas juste les dimanches – tous les jours inconnus –
Sous le tremblement du feu déchu
Que retrouver
La terre nage
Les eaux ont fait naufrage
Quelqu’un s’en est-il souvenu?
On a beau agrafer des paysages
Tenter la traversée des pages
De branche en branche comme un voilier
Les questions continuent
Comment ont-ils pu avaler
En silence
Nos corps
Nos crues ?
Aux dires de la pluie sauvage
Ils ont commencé par nos noms
Pas de ressort, sous ce tapis
Pas de salut.